Nuit d'enfer sous la moustiquaire



notre pire ennemis


Mercredi 19 février 03. Gîte de Martine.

Les réunions de prérentrée terminée, nous avons eu l'occasion de rapatrier notre moustiquaire, au motel de Yedjélé Beach.

Nous l'avions achetée lors de notre week-end éclair à Nouméa. Elle était restée entreposée, avec divers petits achats chez Claude, un collègue qui habite près du port de Tadine.

La moustiquaire, c'était notre obsession. Déjà au tout début de notre affectation sur Maré, nous avions fantasmé. Sur une île, sous les tropiques, chaleur et humidité devaient engendrer des nuées de moustiques de tout poil. Par contre, la lecture des guides offerts à Noël, nous avaient rassuré. Dans la rubrique " désagréments et dangers ", on évoquait bien la chute des noix de coco et les chauffards du samedi soir , mais de moustiques, point. Et puis, vers le 20 janvier, nous avons pu enfin rencontrer un vrai habitant de Nouvelle-Calédonie, Denis. Il y vivait depuis au moins 20 ans et pour son travail dans l'aviation, avait séjourné justement à Maré. Les moustiques étaient redevenus nos ennemis numéro un. Denis employait les grands moyens à coup de ripostes chimiques mais il admettait que la moustiquaire était une arme suffisamment dissuasive, un bouclier protecteur. Comment se procurer une moustiquaire ? Chez Patricia-Intersport? Un coup de téléphone à la famille Pataut nous fait comprendre que ce n'était pas tellement le poids (négligeable : 800 g) mais plutôt l'encombrement qui poserait problème. Dominique nous proposa le catalogue Du Vieux Campeur, mais il était trop tard pour commander. Finalement nous étions partis sans, en se disant que si les moustiques nous attendaient, les néo-calédoniens avaient certainement trouvé toute une panoplie de parades.

En débarquant à Nouméa, déjà, nous voyons les gens se comporter normalement, sans avoir peur des moustiques. Nous dormons 2 nuits à Nouméa, dans notre hôtel grand standinge, et tout se passe le mieux du monde.

La 3è nuit, nous nous hasardons à dormir la fenêtre ouverte. Oui, parce que c'est bien gentil de dormir la fenêtre fermée, mais il fait chaud (environ 30°) et nous dormons mal car nous transpirons. De plus, depuis notre arrivée, et d'un commun accord nous avons eu une idée géniale ( ! ?) : ne pas utiliser la climatisation pour accélérer notre adaptation au climat tropical. Donc cette 3è nuit, enhardis par l'absence de moustiques, nous ouvrons la fenêtre pour profiter de la relative fraîcheur nocturne. Au milieu de la nuit, le bruit suraigu d'une escadrille de moustiques en piqué, fondant sur leur cible repérée par une batterie d'organes high tech utilisant, l'infra-rouge, la détection des molécules humaines et les vibrations, donc, ce bruit caractéristique nous réveille. L'alarme sonne dans nos cerveaux englués par Morphée mais en très peu de temps tout le monde est sur le pont et c'est le branle-bas le grand combat pour notre survie. Très vite, nous nous apercevons que ce ne sont pas les mêmes moustiques qu'à Montperreux. Ceux-ci sont plus vifs, et essayer de les attraper avec la main (en restant dans le lit) est un échec total. Il faut donc se résigner à passer à l'étape suivante : debout sur le lit en sautant comme sur un trampoline, en claquant des mains : Echec ! Ça ne fait rire que les moustiques tapis on ne sait où. Nous refermons la fenêtre. Nous enduisons de crème anti-moustique toutes les parties de notre corps qui dépassent du drap et nous nous résignons à faire fonctionner la " clim. ". Notre stratégie restera celle-ci pour les nuits suivantes.

prospectus Lors d'une de nos balades dans Nouméa, nous apercevons de grandes affiches sur les murs : un énorme moustique noir y est dessiné avec écrit en rouge sur fond noir
" danger " " EPIDEMIE de DENGUE "
Nous trouvons sur les guichets administratifs des dépliants qui nous donnent plus d'informations : la dengue (prononcez " dingue ") est une maladie virale transmise par les moustiques. Le malade est atteint de fortes fièvres, maux de tête, douleurs articulaires et musculaires. Puis suivra une éruption cutanée sur le tronc qui s'étendra aux membres et au visage. Comme la grippe, il n'y a pas de traitement : il faut attendre.

La lutte contre les assoiffés de sang humain est redevenue prioritaire.

Arrivés à Maré, nous trouvons les premières nuits relativement fraîches. Il n'y a pas de clim, mais le gîte est bien situé, face à la mer et surtout face aux alizés qui inlassablement le ventilent. L'absence de moustique lors de nos petites promenades en soirée, nous avait regonflé le moral. Mais assez vite, nous dormons mal car nous recommençons à transpirer la nuit. Pour retrouver un peu d'air, nous décidons d'ouvrir les fenêtres, mais seulement quand les lumières sont éteintes pour ne pas les attirer et, ultime feinte, nous gardons les rideaux tirés. Malgré ce luxe de précautions, nous sommes repérés, en plein sommeil par nos tenaces adversaires.

Ce mercredi 19, donc, nous faisons fonctionner la moustiquaire pour la première fois. D'abord, premier problème à résoudre, il faut l'accrocher. Nous n'avons rien pour bricoler. Nous décidons de l'accrocher au balcon de notre mezzanine avec les sangles de nos sacs de voyage. Mais, pour que le lit soit dessous, il faut le déplacer. Non, non, ce n'est pas aussi simple, souvenez-vous, notre lit repose sur 2 plotets. Bon, nous déplaçons le tout. La moustiquaire encadre le lit et tombe de chaque côté en touchant pratiquement le sol. Nous nous endormons satisfaits et persuadés que nous sommes aussi en sûreté que dans une forteresse construite par l'ingénieur Vauban.

A minuit, le petit bruit bien connu recommence. Mais, rassuré par le souvenir de la moustiquaire, je me dis que l'auteur de ce bruit est forcément à l'extérieur. Je me rendors. Le bruit recommence. Les bras me démangent. Je tire le drap sur moi. Tout à coup, un moustique se pose sur mon oreille. Bien réveillé cette fois, je demande à Marine, qui dormait profondément, d'allumer afin de tuer l'opportun. Nous sommes couverts de boutons, et, oh stupeur ! ce n'est pas un, mais 4 moustiques qui sont prisonniers à l'intérieur de la moustiquaire.

Debout sur le lit, je commence la chasse. J'attends qu'il se pose sur les mailles de la moustiquaire et je referme d'un coup sec mes 2 mains. Je regarde mes paumes : rien. Suivent 2, 3,4..., essais infructueux. Ça m'énerve mais je suis bien réveillé. Il faut que j'apprenne et vite, sinon on va y passer la nuit. Mes souvenirs de tueur de mouche quand j'étais gamin me reviennent : il ne fallait pas chercher à les cueillir là où elles étaient mais un peu plus loin car elles repèraient très vite votre geste de faucheur et elles décollaient avant que votre main ne se referme. il faut donc anticiper. Je vais donc claquer des mains mais en m'éloignant de quelques centimètres du tissu. Je regarde l'intérieur de mon piège. Ça marche. Je vois une tache noire et un rond de sang. Notre sang ! Ça me galvanise. Au suivant. Il faut attendre patiemment qu'il se pose. S'approcher sans l'effrayer et frapper. C'est un véritable massacre. Marine compte les ennemis morts au combat : 6 ! ! !. J'ai les mains pleines de sang. Comment ont-ils fait pour rentrer ? Les mailles sont peut-être trop grandes ? Ou bien, ils passent par dessous ? Où ils se reproduisent à grande vitesse ? Nous décidons de coincer le bas de la moustiquaire sous le matelas. Par sécurité, nous nous enduisons de produit et nous essayons de nous rendormir.

Au matin, j'en tue encore 2 et plus tard, en faisant le lit, Marine en retrouvera encore 4, cachés dans les plis, morts de trouille mais bien décidés à nous sucer la nuit prochaine. Pas de pitié ! Depuis cette nuit fatidique du 19, nous n'avons plus été piqués.

L'expérience et aussi les voisins nous ont appris qu'il y avait quelques précautions à prendre dans l'utilisation de la moustiquaire : faire le lit dans la journée, en vérifiant qu'il n'y ait personne dedans (ressemblant à un moustique, bien sûr), bien coincer le bas de la moustiquaire sous le matelas, et faire attention, en se couchant, qu'aucun clandestin ne s'invite pour la nuit, en même temps que vous.

Guy



notre chambre à Tadine

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